Le beurre et l'argent du beurre
- Essa
- 23 mai 2020
- 3 min de lecture
Dernière mise à jour : 23 avr. 2021
Cela faisait des années que mon bien-aimé psychanalyste me disait que je ne pouvais pas avoir le beurre et l'argent du beurre...Que ce que je voulais n'existait pas ! Je l'écoutais, le croyais sur parole mais ne comprenais pas fondamentalement ce qu'il voulait me dire!
Puis, lors de notre dernière séance, s'est passé ce que l'on appelle un "insight" en psychologie : j'ai non seulement "compris", mais tout mon corps l'a ressenti. Une nouvelle réalité s'est présentée.
Depuis de nombreuses années, si ce n'est depuis toujours, je suis attirée par des hommes qui sont de grands enfants. Ce type de personnes qui vivent sans limites et qui ne pensent guère au lendemain. Cela implique tout un tas de comportements aussi agaçants qu'attachants mais ce qui me plaît chez eux, c'est l’insouciance, la spontanéité, la folie douce, l'extravagance et surtout l'authenticité qui les habitent.
Toutes ces composantes éveillent fortement mon désir... mais, oui il y a souvent un MAIS avec moi ! ... ce désir entrait systématiquement en conflit avec mon désir de sécurité et avec les normes sociales intégrées. Au fil de la relation, je commençais à vouloir "construire", à vouloir faire des projets et à vouloir instaurer une sorte de permanence dans le lien. Bref, je voulais devenir un VRAI couple. C'est une permanence illusoire puisque personne ne contrôle l'avenir mais c'est bien vu par la société qui nous pousse à faire des projets, à se promettre qu'on restera ensemble pour le meilleur et pour le pire alors que plus d'un mariage sur deux finit en divorce, à souscrire à des assurances-vie sans ne jamais les utiliser etc....
Malgré tout, on ne peut pas nier que 98% des personnes me diront que c'est normal de vouloir construire quelque chose au bout d'un certain temps de relation, c'est la suite logique après tout.... Oui, pour la plupart des gens, ça l'est et ça éveille leur désir.
Et bien, pour ma part, quand ce désir de permanence commence à s'installer dans mes liens, rien ne va plus. Non seulement, la personne que j'ai en face de moi ne souhaite absolument pas la même chose et c'est d'ailleurs pour cela que j'ai été attirée en premier lieu, mais pire encore, s'il répond à cette demande par amour, attachement ou contrainte, je me rends compte que mon propre désir s'éteint.....
Et là c'est le drame !
Voici exactement là ou se trouve le fameux dilemme de la crémière...
Si une relation est pré-établie selon des codes implicites mais très stricts qui répondent à l'idée du couple bourgeois, je ne désire plus. Je me vois déjà dans 5 ans dans mon lit en chemise de nuit en train de lire le dernier roman prix Goncourt à côté d'un homme repu de camembert et de vin et je parviens même à l'entendre ronfler en l'écrivant ! .. Inutile de préciser que cette perspective ne m'enchante guère. Je pense que l'"idée de couple" est tellement ancrée en moi pour le moment et de manière plutôt insatisfaisante que je préfère vivre le "non-couple".
Jusque là, je n'avais pas vraiment bien saisi cette impossibilité de joindre ces deux désirs. Et du coup je subissais le fait que mes bien-aimés ne voulaient pas s'engager. Je leur attribuais toute cette responsabilité alors qu'au fond de moi je n'en ai pas le désir non plus.
Je me suis donc prise à mon propre piège ces dernières années en ne voyant pas clairement le jeu qui s'y cachait ! Non, je voulais tout. Avoir la folie des premiers instants et ne jamais savoir de quoi sera fait le lendemain tout en ayant une permanence dans le lien.
Maintenant que j'ai réalisé que pour le moment, mon désir ne peut s'éveiller à l'idée d'avoir du pain frais tous les matins devant ma porte, je pourrais dévorer les croissants quand ils seront là et apprécier le pain sec les autres jours car c'est mon choix, pas celui du boulanger !
J'ai commencé par parler de beurre et termine cette ébauche d'article par une métaphore de pain, je crois bien que j'ai faim !




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